Blocage de sites de streaming : une procédure préparée de longue date. Prochaine étape ? Enquête
- L’action en référé devant le TGI de Paris a été précédée de
notifications aux FAI et moteurs de recherche en août, assure une des
parties, l’APC. La procédure vise à obtenir le blocage de 4 sites, non
du filtrage. Timing parfait, position des FAI et de la Hadopi, ballon
d’essai avant d’autres référés… les réponses de ZDNet.fr. Si
l’action en justice (référé) devant le TGI Paris engagée par les ayants droit du cinéma et
de la vidéo (APC, FNDF et SVEN) a été révélée hier, dans les faits, elle
est en préparation depuis déjà plusieurs mois, comme le confirme
d’ailleurs le délégué général de l’association des producteurs de
cinéma,
l’APC.
« Des contacts avaient été pris, antérieurement à l’été, avec les fournisseurs d’accès et
les moteurs de recherche.
Des courriers leur avaient été adressés pour leur demander de bloquer
l’accès aux quatre sites en question » affirme Frédéric Goldsmith.
Google premier à réagir en retirant Alloshare de son moteurCes
sites sont Allostreaming.com, Alloshowtv.com, Alloshare.com et
Allomovies.com. « Nous avons envoyé des notifications en août aux
opérateurs pour procéder à ces blocages, et aux moteurs de recherche
pour les déréférencer. Ils n’ont pas donné suite, sauf dans un cas »
détaille à ZDNet.fr le représentant de l’APC.
Et une
rapide recherche permet en effet de la confirmer. Seul Google a ainsi donné suite à
cette notification, et ce uniquement concernant le site Alloshare.com.
Ce dernier n’est en effet plus référencé, et Google renvoie, en bas de
la page de résultats, vers
une notification (DMCA) datée du 13 août.
L’assignation
en référé de Google, Microsoft et Yahoo n’est donc vraisemblablement
pas une surprise pour ces entreprises. Contactés par la rédaction,
Google et Yahoo n’avaient pas répondu à notre demande de commentaire
avant la publication de l’article.
Blocage : des FAI invitaient à saisir la justiceApprochés,
les FAI n’ont pas encore réagi, hormis Free qui se borne à déclarer
qu’il ne fera pas de commentaires sur cette procédure de justice. Cette
action des ayants droit était néanmoins prévue par au moins plusieurs de
ces acteurs.
« Nous avons reçu des lettres de certains FAI
importants nous invitant à saisir le juge. C’est désormais chose faite »
confie ainsi Frédéric Goldsmith. Pas question donc pour les FAI de
mettre en œuvre des mesures de blocage sans
décision préalable de la justice.
Car,
comme insiste l’APC, c’est bien une mesure de blocage contre quatre
sites bien précis qui est ici recherchée. « Nous parlons bien de
blocage, et de déréférencement dans le cas des moteurs. Il n’est pas
question
de filtrage. Il n’y pas de collecte de données et les internautes, les utilisateurs, ne sont pas visés. »
Se pose cependant la question du timing. Cette procédure intervient en effet en plein
débat politique sur la lutte contre le téléchargement illégal sur les sites de streaming et de direct download.
La Hadopi s’est ainsi vue confier le 25 novembre la
mission de réfléchir à des mesures techniques et juridiques.
Pas de timing, mais une action qui intervient au bon moment Officialisé le 30 novembre par Eric Besson, le plan numérique 2020 fait de la lutte contre le streaming illégal
une des priorités.
Coïncidence donc ? « C’est une action qui se prépare depuis plusieurs
mois. Il s’avère qu’elle est aujourd’hui en mesure d’être lancée. Il n’y
a pas de timing » assure Frédéric Goldsmith.
« Cela étant,
évidemment, c’est un sujet totalement d’actualité pour tous les secteurs
culturels susceptibles d’être confrontés à la contrefaçon, en
particulier le cinéma. Le développement de ces sites de streaming n’est
un secret pour personnes. Ces sites ont une activité
délibérément contrefaisante,
massive et commerciale, devant laquelle il n’est pas possible de rester
inactif » ajoute néanmoins le délégué général de l’APC.
Reste
à savoir si la charge des ayants droit contre Allostreaming.com,
Alloshowtv.com, Alloshare.com et Allomovies.com n’est pas d’abord un
ballon d’essai, une première expérimentation avant d’autres actions
contre des sites plus connus comme MegaVideo et MegaUpload.
«
Nous nous concentrons sur cette action » élude Frédéric Goldsmith. Est
éludée également la question d’un échange, au moins officieux, entre les
ayants droit du cinéma et la Hadopi. En clair, la Haute autorité
était-elle informée de cette procédure entamée depuis plusieurs mois et
de son aboutissement le 30 novembre ?
La Hadopi était-elle informée ? «
C’est une procédure judiciaire qui est du ressort des ayants droit.
Nous sommes dans un processus distinct de la réponse graduée » déclare
l’APC. Du côté de la Hadopi, le message est clair « Nous souhaitons
insister sur le fait que nous ne ferons aucun commentaire sur une
procédure de justice en cours. Aucune observation. C’est la même ligne
que pour
l’enseignant Robert Thollot. »
En juillet, par le biais d’un communiqué,
la Hadopi avait défini
une ligne directrice : la priorité des ayants droit doit être l’offre légale et ces derniers
doivent donc la tenir informer de toute expérimentations sur le
filtrage.
Mais des actions en justice visant des mesures de
blocage entrent-ils dans le cadre de ce dialogue continu entre la Hadopi
et les ayants droit ? Terrain délicat laissent penser les contacts pris
par ZDNet.fr.
Quoi qu’il en soit, la possibilité d’une telle
procédure n’était pas inconnue de la Haute autorité. L’action contre ces
4 sites est fondée sur
l’article L336-2 du Code de la propriété intellectuelle, fruit de la loi Hadopi et
promulgué au JO en juin 2009.